La caféine a un impact sur nos capacités cognitives. Des dérivés chimiques du café pourraient servir de médicaments contre la maladie d’Alzeihmer.

Avec plus de 850 000 personnes atteintes en France, la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées représentent la première cause de démence dans le pays. La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative caractérisée par une atteinte de la mémoire et d’autres déficits cognitifs/comportementaux : agressivité, aphasie (trouble du langage), agnosie (trouble de la reconnaissance de l’entourage), apraxie (maladresse gestuelle).

Si le diagnostic de probabilité de la maladie d’Alzheimer repose sur différents critères cliniques aidé par le dosage de biomarqueurs dans le liquide céphalo-rachidien, voire l’imagerie IRM ou métabolique, le diagnostic de certitude repose sur l’observation neuropathologique de plaques extraneuronales formées de peptides amyloïde (petites protéines formées normalement qui s’accumulent de manière toxique à l’extérieur des neurones) et de lésions intraneuronales composées de protéines Tau anormales (protéines favorisant normalement la communication cellulaire au sein du neurone). Ces lésions entraînent un dysfonctionnement des cellules neuronales, engendrant les troubles cognitifs.

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Le premier facteur de risque de la maladie d’Alzheimer est le vieillissement. Néanmoins, une combinaison de facteurs génétiques et environnementaux joue également un rôle important.

Caféine et Alzeihmer

La consommation de café exerce un impact particulier sur ce risque. Le café est la boisson la plus consommée au monde après l’eau. Le café est également la première source de caféine qui reste à ce jour son constituant le mieux caractérisé. La caféine est la substance psychoactive la plus consommée au monde. Il est bien établi qu’elle favorise les processus attentionnels, l’éveil, le traitement de l’information et a, de ce fait, un impact significatif sur les performances cognitives chez l’homme et l’animal.

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Des travaux récents suggèrent également un effet de la caféine sur les processus mnésiques, et la mémoire à long terme en particulier, indépendant de ses effets attentionnels. Cette observation est à mettre en lien avec différentes études épidémiologiques proposant que la consommation habituelle de caféine réduit le déclin cognitif au cours du vieillissement.

D’autres études prospectives mettent également l’accent sur la relation inverse existant entre consommation de caféine et le risque de développer la maladie d’Alzheimer. Les effets protecteurs de la caféine seraient optimaux pour des doses correspondant à 3 à 4 tasses par jour. De manière intéressante, différentes études expérimentales sur des modèles animaux de la maladie d’Alzheimer reproduisant les lésions et les troubles de la mémoire associés démontrent un effet bénéfique de la caféine à des doses comparables, même si les effets sur les symptômes comportementaux de la maladie ont été récemment discutés.

Comment ça marche ?

Les cibles principales de la caféine sont des récepteurs appelés récepteurs adénosinergiques. Les effets de la caféine sont particulièrement liés à sa capacité à bloquer l’un de ces récepteurs appelé récepteur adénosinergique A2A.

Il y a quelques années, notre équipe a démontré que bloquer spécifiquement ce récepteur par des approches génétiques et par un dérivé chimique de la caféine réduisait les troubles de la mémoire, les troubles de la communication neuronale et les dysfonctions de la protéine Tau dans un modèle animal de la maladie d’Alzheimer.

Dans une nouvelle étude, notre équipe, en collaboration avec des collègues de l’université de Lisbonne et de Bonn, vient de démontrer que le blocage des récepteurs adénosinergiques A2A par ce même composé dérivé de la caféine réduisait les lésions amyloïdes dans le cortex et les troubles mnésiques associés dans un modèle animal reproduisant les plaques amyloïdes. Cette nouvelle étude suggère donc que les composés dérivés de la caféine ciblant les récepteurs adénosinergiques A2A agissent positivement vis-à-vis des deux lésions cérébrales caractéristiques de la maladie.

Vers une piste thérapeutique ?

L’ensemble de ces observations amène à penser que l’utilisation de molécules dérivées de la caféine serait une option thérapeutique chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Il est très intéressant de constater que ce type de molécules existe et a déjà fait l’objet d’essais cliniques dans le contexte de la maladie de Parkinson. Il est donc envisageable et intéressant de repositionner ces molécules dans le contexte thérapeutique de la maladie d’Alzheimer.

Avant d’envisager des études chez l’homme, nous devons apporter des éléments additionnels convergents renforçant le concept qu’il est important de bloquer les récepteurs A2A. Ce sont les études expérimentales que nous menons actuellement. Nous espérons pouvoir définir une stratégie d’essai clinique dans les trois à cinq ans à venir et réunir des financements à cette fin.

*David Blum est directeur de recherche Inserm à l’université de Lille.


Cedric Liam Youbi

Blogueur et développeur web et mobiles à Smook Creative passionné de lecture de sport et de musique

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